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mardi 11 février 2025
Suicide de Matar Diagne : Une détresse ignorée dans l’université sénégalaise
Par La rédaction,

Par Matar Ndiaye, Journaliste d’investigation

La communauté estudiantine sénégalaise est sous le choc après la découverte du corps sans vie de Matar Diagne, étudiant à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis. Avant de mettre fin à ses jours, il a laissé une lettre bouleversante où il exprime son désespoir face à l’isolement, à la maladie et aux jugements sociaux qu’il a subis. Ce drame révèle des failles profondes dans notre société, notamment en matière de prise en charge psychologique et de solidarité envers les plus vulnérables.

Un cri de détresse ignoré

À travers sa lettre, Matar Diagne nous fait entrer dans l’intimité d’une douleur silencieuse. Élève brillant, premier de son centre au baccalauréat, il a vu son avenir s’assombrir avec l’apparition d’une maladie chronique. Pourtant, ce n’est pas la maladie qui l’a tué, mais le regard des autres, l’exclusion et la médisance. Il écrit :

« L’isolement, additionné à la souffrance de la maladie, a eu des conséquences néfastes sur moi. Je ressens une tristesse intense. Il y a une tempête dans mon cœur. »

Ces mots, lourds de sens, reflètent une détresse psychologique profonde. Mais que fait notre société pour entendre ces cris silencieux ? Rien, ou presque.

L’université, un espace de savoir mais aussi de souffrance

Loin de n’être qu’un simple lieu de transmission du savoir, l’université est aussi un microcosme social où les étudiants vivent diverses formes de pression : académique, financière et sociale. Dans le cas de Matar Diagne, l’université est devenue une prison psychologique où il était jugé pour son isolement :

« Ki dafa bonn, dou dem thi nitt yi. Beugoul nitt yi. »

Ce genre de commentaires, trop banalisés dans notre société, détruit des vies. Ils démontrent une incompréhension totale des souffrances individuelles et renforcent l’isolement des personnes en détresse. Dans un pays où la santé mentale est souvent négligée, combien d’autres Matar Diagne vivent dans l’ombre, en silence ?

Un système éducatif et social défaillant

L’un des passages les plus poignants de la lettre concerne la médisance et les accusations dont il a été victime :

« Ce qui m’a le plus déchiré, ce sont les conjectures sur ma maladie, les calomnies et les accusations non fondées. »

Pourquoi notre société est-elle si prompte à juger sans chercher à comprendre ? Pourquoi, au lieu d’apporter du soutien, préférons-nous répandre des rumeurs et des accusations infondées ? Ce fléau détruit des vies et révèle une grande faille dans notre système éducatif et social.

L’université, censée être un espace de tolérance et d’ouverture, devient parfois un terrain de marginalisation et de rejet. La question de la santé mentale y est quasiment absente. Les services d’orientation et de soutien psychologique sont inexistants ou inefficaces. La détresse des étudiants n’est jamais une priorité.

Leçons de vie : briser le cycle du silence et de l’exclusion

La lettre de Matar Diagne est un appel à la réflexion collective. Son message est clair :

« N’isolez personne, n’ignorez personne, ne vous moquez de personne et ne fuyez personne. »

Combien de vies auraient pu être sauvées si nous avions fait preuve d’un peu plus d’humanité et d’écoute ?

Ce drame doit nous pousser à réformer notre façon d’interagir avec les autres. Voici quelques leçons que nous devons en tirer :

  1. Briser le tabou de la santé mentale : Il est urgent que la question de la détresse psychologique soit prise au sérieux dans les universités. Des cellules d’écoute et d’accompagnement psychologique doivent être mises en place.
  2. Éduquer à l’empathie : Dès le plus jeune âge, nous devons apprendre à nos enfants à comprendre et respecter la souffrance des autres. L’éducation doit inclure des notions de psychologie et de bienveillance.
  3. Mettre fin à la culture de la médisance : Les rumeurs et les jugements hâtifs détruisent des vies. Il est temps que la société sénégalaise prenne conscience des dégâts qu’ils causent.
  4. Créer des espaces de dialogue et de soutien : Au sein des campus, mais aussi dans les familles, nous devons encourager les discussions sur les difficultés personnelles sans peur du jugement.

Un testament poignant et un dernier vœu à honorer

Au-delà de sa détresse, Matar Diagne nous laisse un dernier message d’espoir à travers son roman « La fuite des indésirables », qu’il souhaite voir publié pour financer le traitement de sa mère atteinte d’un AVC.

Ne pas exaucer ce vœu serait trahir son ultime volonté. Les autorités académiques, les maisons d’édition et les citoyens doivent se mobiliser pour honorer cette dernière trace qu’il souhaitait laisser dans ce monde.

Conclusion : Ne laissons plus d’autres Matar Diagne mourir en silence

Matar Diagne n’est plus. Mais combien d’autres jeunes vivent aujourd’hui la même souffrance sans oser en parler ? Ce suicide n’est pas un simple fait divers. C’est un signal d’alarme sur une société qui ne sait plus écouter, comprendre et soutenir ses propres enfants.

Il est encore temps de changer. Faisons de ce drame un tournant. Que la mort de Matar Diagne serve à sauver d’autres vies. Que son sacrifice nous ouvre enfin les yeux sur la souffrance silencieuse qui gangrène notre jeunesse.

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